Martin Lichtig
Par les blés
Quand l’architecture d’intérieur devient la scénographie d’une exposition. Une exposition montée à la manière d’un chiffonnier un peu archéologue, d’un chercheur qui assemble les preuves, comme les pièces d’un puzzle. Sa collecte est patiente mais irrémédiablement débordante. Alors les murs ne suffisent plus au poids des évidences et il faut se rendre à l’une d’entre elles : en échafauder davantage. Ces murs nouveaux toisent les anciens dont ils sont pourtant d’étranges excroissances. Ainsi, s’est progressivement formé tout un organisme, maniable et complaisant à l’égard de trouvailles régulières et de récurrentes découvertes.
Ces pans de bois articulés échappent aux classifications conventionnelles des agencements. Ils se déplient depuis les murs, faisant tout à la fois office de paravent, de coupe-vent, de pare-sons, de cimaise en accordéon, de malle de rangement ou encore d’abat-jour, d’interrupteur et de variateur de lumière. Le pan se fait volet intérieur, pourvu d’une lumière artificielle ou percé, il éclaire les œuvres accrochées au mur.
Dans cette salle d’exposition, on découvre le monde à travers les productions d’artistes partis l’arpenter : Violaine Barrois, Arnaud Bottini, Amandine Capion et Chloé Chéronnet. Ce sud, non idéalisé, ils l’ont rapporté dans ses ruines et ses chantiers, son impermanence et ses recommencements, son âpreté et sa vulnérabilité. Que l’on ne s’y trompe pas, la collecte de quelques-unes de leurs œuvres n’est que l’écho, affaibli, de la véritable récolte visible dans leurs pratiques respectives. Et, se rendant à l’évidence qu’il ne pourrait en échafauder suffisamment, le chiffonnier s’en est finalement allé à son tour par les blés.