Paolo Roversi
Silenzio
4’33ˮ est le titre de la fameuse composition en trois mouvements de John Cage.
Alors que l’audience pourrait la percevoir comme quatre minutes et trente-trois secondes de silence — puisque les musiciens ne jouent d’aucun de leur instrument — la performance est en fait créée par l’ensemble des sons environnants; les chuchotements, le tapotement des doigts, le bourdonnement de
l’air conditionné, les mouvements des sacs, des membres, des chaises et des vêtements. Une musique comme un son pur et essentiel, une musique qui calme l’esprit.
À première vue, titrer une exposition photographique « Silenzio » (silence en italien) pourrait sembler étrange. Néanmoins, nous vivons dans une ère où l’image est devenue le langage commun, souvent utilisée pour crier, prévaloir et même parfois pour opprimer.
Ces images sont perçues comme fugaces et jetables, elles disparaissent dès qu’on les a fait défiler.
À l’inverse, les photographies de Paolo Roversi sont faites de silence et de secrets ; elles parlent doucement mais fermement, et vous invitent à vous arrêter. Les images de l’exposition sont remplies de contradictions. Elles nous ramènent à cette magie, si ordinaire à l’aube de la photographie, lorsque ces copies du réel étaient regardées avec un mélange de perplexité et d’émerveillement.
Ces images sont un interlude dans la vie de tous les jours, des fissures à travers lesquelles, quelque chose d’un autre monde pourrait accéder au subconscient de l’observateur. Elles sont faites pour être contemplées, pour intriguer et remplirde doutes. Elles exigent de la concentration et de la réflexion, mais n’imposent ni signification ni interprétation. Elles sont une porte ouverte vers une pièce faite de silence.
Traduction : CLARA BELLEVILLE
Photographie : Luc Bertrand