Damien Poulain, Pavillon éphémère

Fronton, fresque in situ et exposition, commande du festival
& Halles de toulon

COMME UN NAVIRE DANS LA VILLE
Damien Poulain parcourt le monde, la géométrie de ses couleurs circule librement entre l’art, le design, l’architecture et l’espace public. Ses œuvres prennent également forme dans la performance collective. Sa pratique est populaire, ses œuvres il les veut accessibles. La simplicité est au cœur de son travail, elle est une vraie quête, sensible et nécessaire, qui permet la liberté et le partage. Damien, l’expérience du lieu est essentielle dans ton travail. Ici, la fresque Pavillon éphémère recouvre les murs de la cour intérieure de l’Ancien évêché de Toulon. Pourrais-tu nous en dire davantage sur le contexte de cette commande pour le festival Design Parade ? Cette fresque est une commande de la villa Noailles pour Design Parade. Son directeur Jean-Pierre Blanc m’a donné carte blanche pour créer une peinture murale dans la cour. La confiance accordée est extraordinaire, elle m’a permis de laisser libre cours à mon imagination et de laisser flotter mes idées pour poser mes combinaisons de couleurs sur un bâtiment historique de la ville de Toulon.

Le fait de t’inscrire dans un bâtiment historique et religieux t’a-t-il conduit à procéder de manière différente par rapport à d’habitude? Comment s’est construit le dialogue ?
Investir un lieu, c’est aussi se l’approprier, et dans ce cas j’ai imaginé l’architecture de la cour en relation à un tout, à la ville de Toulon et son univers. J’ai transformé l’évêché en navire pour le laisser pavoiser dans la ville et l’unir à la mer. La partie peinte n’étant pas sur la partie classée, elle devient une collaboration avec un patrimoine historique, mais dans aucun cas je ne me suis laissé intimider ou influencer par le bâtiment et son histoire, mis à part ses formes et les nombreuses cellules, qui, dans mon imaginaire, auraient pu me faire penser aux cabines d’un navire. J’imagine que la cour t’a inspiré : à ciel ouvert, elle est un espace de partage et de traversée où l’on se retrouve individuellement et collectivement dans le cœur toulonnais. La cour est un lieu de rencontre, entre l’intérieur et l’extérieur, la sphère publique et privée. Un théâtre ouvert où se croisent le public de la rue et les invités du festival. C’est ce qui m’intéresse le plus dans ce lieu, il est un lien entre la rue et l’intime où l’on peut se poser, comme sur le ponton d’un navire. Je l’ai transformée en «pavillon», en jouant sur la double signification du mot, à la fois bannière d’identification de marine et bâtiment d’agrément, faisant partie d’un ensemble architectural plus large.

Je voulais justement te parler du titre que tu as choisi, Pavillon éphémère, il convoque différents univers et références. Tu peux nous en dire quelques mots ?
J’ai voulu m’imprégner de la ville, comme je le fais toujours, je déambule dans ses rues et je laisse mon regard se poser sur des éléments qui l’accrochent. Ce que je retiens de Toulon c’est la mer, ses bateaux et son port. J’ai aimé observer les maquettes des grands navires au Musée national de la Marine, ces entreprises, ces monuments, qui partaient pour de grandes aventures à la conquête d’autres continents. Cette visite m’a inspiré pour peindre la fresque : j’ai recouvert les murs de la cour avec des formes triangulaires, en référence aux pavois. Le pavois est l’ancien mot du pavillon mais il fait référence aussi à ces petits bouts de tissus colorés que l’on accrochait aux cordes entre les mâts pour célébrer un événement heureux. Affublé de sa nouvelle parure, l’évêché pavoise. C’est de là que vient mon idée de pavillon, comme un bâtiment prêt à partir, avec ses participants, embarquant pour une épopée de quelques mois.

Comment les couleurs t’ont-elles été dictées ?
C’est toujours le lieu qui définit la couleur. Je n’arrive pas en territoire conquis. Les couleurs sont donc toulonnaises, nées de la mer et de la montagne qui l’enserrent, des bâtiments subtilement colorés et de leurs volets – de somptueuses architectures des années 1950-1960 –, et enfin du dialogue avec le vert rayonnant des palmiers qui ponctuent la ville. Depuis la cour, mon regard s’est vite posé sur le ciel, il était comme un aplat de couleur bleu, balayé par des nuages blancs. Le jaune m’est alors apparu comme une évidence lumineuse et joyeuse pour l’y convier. Il est la couleur associée à l’univers marin où le ciel et les étoiles sont encore guides et gardiens des temps.

ENTRETIEN AVEC DAMIEN POULAIN PAR CLAIRE LUNA

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