Pas tout à fait une autre, Cécile Guettier

Cécile Guettier, lauréate du prix villa Noailles des Révélations Emerige 2021
Exposition peinture, dessins
ENTRÉE LIBRE
du 9 décembre 2022 au 11 février 2023
du mercredi au samedi de 11h à 17h, le dimanche de 11h à 15h.

Ancien Évêché
69 Cours Lafayette 83000 Toulon

Cécile Guettier

LAURÉATE DU PRIX VILLA NOAILLES DES RÉVELATIONS EMERIGE 2021

Née en 1992 et diplômée de l’Ecole Supérieure des Beaux Arts de Nantes Métropole en 2018, Cécile Guettier est récipiendaire du prix villa Noailles Emerige 2021.
Elle vit et travaille à Paris.
À la découverte du travail de Cécile Guettier, notre regard est à la fois emporté par des couleurs en vibration, un fourmillement de traits, une variété de matières, et fixé par une composition claire et des tracés sensibles. La volonté de l’artiste rencontre sur la toile et le papier, au carrefour des détails, un bizarre hasard, des accidents propres au langage pictural, qui vont dans le sens de ses représentations et les renforcent ; c’est à croire que l’image préexistait comme un aimant dans le blanc, et que toute tache tombant sur le support allait la remplir.
Les figures présentes dans son travail n’appartiennent ni au rêve ni au cauchemar ; chimériques, leurs couleurs attrayantes nous gardent d’être effrayés par elles, et leurs actes inquiétants de les vouloir rencontrer. C’est sans doute cette ambivalence qui rend généreuse la contemplation de ces oeuvres ; une excitation silencieuse s’installe, notre imagination va d’indice en indice. Par leur singularité plastique et narrative, les images de Cécile Guettier prennent place dans notre mémoire auprès de celles qui nous apportèrent des réponses en même temps qu’elles inventaient les questions.
Pour son exposition «Pas tout à fait une autre», développée au cours de trois mois de résidence à la villa Noailles, Cécile Guettier s’inspire du mythe originel de Penthésilée et de sa version en miroir écrite en 1824 par le dramaturge allemand Heinrich von Kleist, pour raconter de façon polyphonique la rencontre amoureuse, violente, frustrante et tragique, d’Achille et Penthésilée pendant la guerre de Troie.
Cela lui permet de développer dans le cadre d’un récit mythologique les thèmes déjà présents dans ses peintures, confrontations, passions , dévorations, masques, postures et impostures, labilité du corps et des sexes. Les deux héros du mythe, toujours dans la démesure des actes et des sentiments , trouvent dans cette exposition des représentations à l’aune de leurs excès. Jon Monnard, écrivain suisse qu’elle a eu le plaisir de rencontrer durant son séjour à la villa Noailles a eu la gentillesse d’enrichir l’exposition d’un poème que lui inspire ce projet

Lors de sa résidence à la villa Noailles

on a écrasé avec le poing des mûres sur le ciel.
ça chuchote ici,
un bruit de cristal là-haut ; on dit que des bris de verre viendront les déchirer.
les éléments se tordent. ils portent la couleur des furies.
les nuages s’agitent
se mêlent dans le vent
les horizons se déchaînent. ils sont chiens et éléphants célestes et délirants
qui piétinent la ville.
je suis dehors. je t’attends.
c’est moi dans la lumière bleue et verte laser.
j’ai acheté d’un peu
de ce qui nous rendait
autrefois
heureux.
je bois, je trie
les pensées que j’ai de toi
ce soir.
Il ne reste plus grand-chose
je crois.
le lion pleure au-dedans.
un bloc de grès s’écrase sur le sol.
c’est pas joli ce qui nous arrive tu diras
pas tout à fait.
parce que tu nous as corrigés. il a fallu des larmes
couleurs des cœurs
et de la honte
pour te sentir
à nouveau
vivant.
les brûlures
le désordre
les traces
les mauvais gestes
de cette vie dévorante de reproches
d’amour
de rêves pétés d’ennuis et d’attentes.
on n’a rien à faire. je veux dire
il n’y a rien à faire. et toi
toi, moi
tout est trop
ce monde est trop grand.
nos corps se cassent. regarde à l’intérieur l’accident
et les bagarres.
on s’aime pourtant
c’est beau c’est vrai nous deux à feu et à sang c’était beau c’était vrai.
tout traverse tout tranche tout éclate les armures les boucliers les casques.
pourquoi
une cuirasse d’or
pour les cœurs
ils en furent incapables ?
alors d’ici je te vois
tu es dans la lumière.
elle te recouvre
on dirait de la poudre
et toi un essaim de poussières.
nous étions nucléaires nocifs et puissants.
j’arrive, je traine.
tu me vois.
je lève les yeux.
rien ne viendra.
aucune sauterelles d’argent aucune éclaboussure aucun réveil
aucune merveille.
aux sentiments voyous on s’habituera.
à nos prochains silences à notre disparition aussi.
ce soir on se dira tout sous ce ciel
en charpie.
Jon Monnard, 2022

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